Les Chroniques de Valentin

Il n'est pas d'exil dont on revienne indemne

Je suis las, épuisé, toute énergie m’a quitté.

Je suis revenu désabusé. Là-bas j’avais un tel sentiment de liberté, de possibilités qui s’ouvraient à moi, de nouveaux horizons, et surtout de simplicité. J’ai réalisé que je pouvais vivre avec rien, que je n’avais pas besoin de grand chose pour être heureux. Qu’en réalité la consommation c’est la déprime, qu’accumuler des étagères, des armoires et des appartements remplis d’objets ce n’est creuser que sa tombe à coups d’anxiolytiques.

Quand je suis rentré, que j’ai vu mon bordel, j’ai halluciné. J’avais tout oublié. J’avais oublié tout ça. Ma collection de centaines de livres et bande dessinées. Les centaines de DVD et CD audios. Quand tu sais le prix que ça vaut toutes ces merdes, tu te dis que j’en ai dépensé de l’argent pour du plastique et du papier. Ça prend une place folle. Et pour quoi ? Les livres je ne les relirais sûrement jamais. Les BD je les ai lues une fois en une ou deux heures chacune à tout casser. 15 € la BD, ça fait cher l’heure passée. OK c’est chouette ça me laisse de bons souvenirs mais quand même, c’est du gâchis. Et je ne prend même pas en compte ce qui est encore dans les cartons. La télé, le lecteur DVD, le téléphone DECT, l’ordinateur, la guitare, les cartons d’archive remplis de paperasses dont je me contrefout… Putain mais rien à faire des impôts, des fiches de paie, des feuilles de soin des mutuelles, des relevés de compte. Tout ça j’en ai rien à battre, et ça m’emmerde au plus haut point. C’est une perte de temps. Je brûlerais bien tout mais il faut garder pour telle ou telle raison officielle. Pour une retraite que je ne verrais jamais.

Super.

Quand j’ai vu tout ça, je me suis dit que j’avais été fou. Pourquoi a-t-on besoin de 5 couettes ? De 4 cartons de vaisselle ? D’un bureau, d’un four, d’un frigo, d’un micro-onde ? À quoi ça sert ? Je ne comprenais pas.

Depuis je ne supporte plus la vue de l’électroménager. J’ai envie de vomir à l’approche de noël à la vue de tous ces catalogues qui essayent de te vendre encore plus de conneries inutiles. Et vas-y un smartphone par là, une télévision 3D par ci. Y’a même des magasins qui ont ouvert qui ne vendent que des coques pour iPhone. Sérieusement.

Et quand je croise les rues tristes des banlieues moches, avec leurs maisons crépies, leurs décorations de noël qui clignotent toute la nuit, je ne comprend toujours pas. Comment peut-on accepter de venir s’enterrer là ? Comment peut-on travailler, gagner de l’argent, seulement pour financer un emprunt pour ce tombeau à ciel ouvert. Je ne comprend pas. On n’a pas besoin de voiture. On n’a pas besoin de radiateurs électriques. De câbles HDMI. De sonnette sans fil. De systèmes d’alarme. D’une boîte au lettre. D’une ligne de téléphone. De payer une taxe d’habitation.

Payer pour habiter. Je préfère encore n’habiter nulle part tiens. On n’a besoin de rien. Juste d’un sac à dos, d’une paire de chaussures. Et de rêves un peu moins stupides que de simplement désirer un nouveau vêtement ou équipement électronique. C’est si simple. Je ne comprend pas que vous soyez encore là. Je ne comprend pas que j’y sois aussi.

Elle est où la sortie ?