J'écris l'amour...
Extraits d’une lettre imaginaire de Valentin à Léa:
«Des fois je t’aime.
Des fois je t’aime encore plus.
Des fois je m’aperçoit qu’un étrange sentiment m’envahit.
Un sentiment beau et chaud qu’ici bas on pourrait appeller amour.
Mais moi je ne lui donne pas de nom car il n’en a pas.
Des fois j’ai envie de sécher tous les cours
Et de t’emmener avec moi loin d’ici, loin des hommes et de leur folie.
Et quand on reviendrait, si on revient un jour,
On écrirait "Amour" comme excuse sur le mot d’absence du lycée.
Et tant pis si c’est une absence injustifiée pour eux,
Laissons-les crier au gré du vent.
Toutes ces personnes qui voudraient nous guider,
Nous dire quoi faire, quand, où.
L’amour ne justifie pas une absence,
Il justifie tout.
Pas besoin d’explication,
Pas besoin de justification,
Pas besoin d’excuses,
Pas besoin d’autorité,
Pas besoin de police, de répression, de prison, de censure,
L’amour est libre.
Je suis libre.
Et un jour je viendrais peut-être leur dire,
A tous ceux-là, tous ceux qui veulent me dire ce que je dois faire,
Je leur dirais qu’ils n’ont rien compris.
Non, rien de rien.
Qu’il n’y a pas à chercher d’excuse.
Qu’il n’y a rien à comprendre.
Que l’amour ne s'étudie pas.
Je ne veux pas savoir
Si je suis conforme
Si la société m’accepte
Si mes vêtements sont à la mode
Si j'écoute la bonne musique
Si je regarde la bonne télé
Si je dois avoir des diplômes
Si j’ai le bon cerveau bien formaté
Si ça sert à quelque chose ce qu’on apprend à l'école
Si les autres ont une bonne opinion de moi
Si mes idées sont comprises
Si j’ai un avenir
Je ne veux pas savoir
Je m’en fous
Tant pis si personne ne comprend ce que je veux dire
Tant pis si mon nom ne sera pas retenu dans l’histoire
Tant pis… Je m’en fous»
Et dans une autre lettre imaginaire, Valentin écrit à Léa:
«Tu dit souvent que j’ai perdu mon âme d’enfant
Non je ne crois pas, au contraire.
J’ai encore mon âme d’enfant mais elle n’aime pas être trompée
Je suis émerveillé par tout ce qui m’entoure
Je contemple la vie avec mes deux yeux
Je regarde les gens dans la rue
Je regarde les routes, les immeubles, les voitures, les lampadaires, les vitres...
Je regarde le monde qui m’entoure et je le trouve beau
Ma tête est comme un film, tout est mis en scène
Des plans, des angles de caméra, des acteurs, un décor...
Ma vie est un film, mais le scénario en est écrit progressivement
Je peux passer des heures à regarder tout ça,
A regarder le monde tourner
Et moi je trouve ça beau, je suis comme un gamin,
Je suis émerveillé par ce monde et son horreur.
Alors bien sûr non je n’aime pas la barbe à papa,
Je n’aime pas les manèges,
Je n’aime pas cette odeur de graisse mêlée au sucre,
Je n’aime pas cette idée d'émerveiller les enfants avec tout ce qui brille,
Je n’aime pas qu’on prenne les gosses pour des idiots.
Est-ce que ça fait de moi quelqu’un qui a perdu son âme d’enfant ?
J’aime bien aussi m’amuser, mais pas dans des fêtes foraines, plutôt dans des parcs d’attraction.»
Valentin est fou. Fou d’amour. Fou de Léa. Fou de la vie. Il est fou. Il en est fier. Il ne reverra Léa que jeudi prochain, dans six jours. Six jours, c’est long, trop long. Et Valentin n’a toujours pas trouvé de cadeau pour Léa. Il n’aime pas faire des cadeaux. Il doit sûrement être égoïste. Non en fait il aime faire des cadeaux, mais il n’aime pas faire des cadeaux pour des occasions bien prévues à l’avance. Mais il va faire un effort. Lundi il va aller chercher un cadeau pour Léa. Il a déjà une petite idée mais il y a deux obstacles, le premier étant son budget, le deuxième étant que Léa ne va peut-être pas aimer. Mais il faut savoir prendre des risques…
Valentin aime Léa. Mais cet amour n’a pas de nom, pas de visage, pas de corps. Il n’est ni matériel, ni immatériel. Il est au dessus de tout. Au dessus de tout ce que Valentin peut maîtriser. «Je ne sais peut-être pas de quoi sera fait demain, mais je sais ce qui me guidera toute ma vie, ce que je ressent maintenant : Je t’aime». Fin de la lettre imaginaire de Valentin. Bonne nuit.