Les Chroniques de Valentin

Une vie ordinaire

Je me lève tous les matins avec cette même rengaine celle qui m’obsèdait déjà quand je dormais celle qui dis qui dis je sais plus j’ai oublié celle qui me dévore je suis coincé dans cette pièce exigue et je pense à la rengaine et la rengaine devient litanie qui devient une obsession qui devient de l’hystérie qui devient de la folie une déviance alors je sais plus quoi penser elle se répète dans mon cerveau et fait des noeuds ça tourne en boucle comme un vieux disque mais ça s’arrête pas je me frappe la tête contre le mur mais ça s’arrête pas je voudrais m’ouvrir le crâne avec des ciseaux et découper ce qu’il y a dedans faire des guirlandes de motifs des flocons de noël mais ça s’arrête pas je deviens taré totalement je hurle mais putain je hurle et ça fait du bien mais le cri me déchire les oreilles les oreilles qui commencent à ne plus supporter le bruit et desquelles sort soudainement un liquide jaunâtre horrible et nauséabond c’est que je suis en train de pourrir je le sais j’en suis persuadé c’est cette putain de rengaine qui recommence et continue et tous les jours c’est comme ça je redeviens fou tous les matins à la même heure avec la même rengaine c’est ma putain de vie ma monotonie quotidienne je suis un fou qui tourne en boucle qui recommence tous les jours les mêmes actions les mêmes pensées les mêmes pulsions les mêmes réflexes je suis prévisible et pitoyable tous les jours le même boulot les mêmes horaires les mêmes habitudes les cons au bureau les cons dans le métro les cons partout j’ai accepté ça j’ai dis ok ça pourrait être pire mais j’ai toujours su que ça pouvait pas être pire que cette vie de merde cette monotonie cette répétition cette rengaine pourrie cette agonie lente et préparée c’est ma vie ma putain de vie une vie de fou de malade une vie qui ne sert à rien une vie une vie mais c’est la vie normale sensée prévisible prévue ordinaire sans surprise. Une vie ordinaire.